Selon les estimations, la fraude publicitaire coûte entre 7 et 17 milliards de dollars par an dans le monde, et ce montant est en augmentation constante(1). Le manque à gagner est énorme, et vient s’ajouter à celui dû à la multiplication des intermédiaires. Les plus touchés par ce phénomène sont les éditeurs : aujourd’hui, sur 1 euro dépensé par l’annonceur, l’éditeur ne perçoit que 34 centimes, le reste allant aux intermédiaires.
Le blockchain advertising, et notamment MetaX avec la sortie de leur outil adChain, fait la promesse de mettre fin à ces deux maux et d’apporter la transparence attendue par le marché.
Qu’est-ce que la blockchain ?
La blockchain – dont on entend beaucoup parler ces dernières années – est tout simplement une base de données qui contient l’historique de tous les échanges entre ses participants, depuis sa création.
Plus précisément, c’est une chaîne qui se construit comme suit : deux utilisateurs du réseau font une transaction. Cette transaction est vérifiée, validée et horodatée par le reste du réseau, puis placée dans un bloc. Ces blocs sont ensuite mis à la suite les uns des autres, formant une chaîne. Une fois qu’un bloc est ajouté à la chaîne, il ne peut être ni supprimé, ni modifié. Une façon de voir la blockchain est de se la représenter comme un grand livre comptable automatique, duquel rien ne peut être effacé ou modifié.
L’intérêt central de la blockchain est donc, vous l’aurez compris, son incorruptibilité, mais aussi le fait que ce grand livre comptable est entièrement décentralisé. Sans stockage central des données, il n’y a pas de faille à exploiter : la sécurité est donc maximale.
La vérification : Vos publicités sont-elles réellement vues par vos audiences ?
La première application de la blockchain à la publicité digitale est la possibilité de vérifier les impressions. C’est ce que propose MetaX : leur partenaire adChain intègre un tracker dans le fichier xml de la bannière, qui pourra ainsi être suivie par tous les participants de la blockchain. Le processus est le suivant : l’acheteur acquiert l’impression, puis la transaction est encryptée et placée dans un bloc rendu ensuite accessible à tous les participants de la chaîne. Ce tracker permet alors en temps réel de vérifier si les standards de visibilité sont atteints ou par qui l’impression est vue.
Il y a donc ici deux avantages principaux : l’accès à toutes les données liées à une impression, et la création d’un « chemin vérifiable des transactions ». Ce second avantage est non négligeable : ces transactions sont entièrement vérifiables et transparentes, et assurent ainsi l’identification et le blacklisting des fraudes quasiment en temps réel. Enfin, problèmes de fraude mis à part, la vision holistique de toutes les données liées à l’impression permet de repérer les goulots d’étranglement au niveau de la supply chain, et de prendre des mesures correctives si nécessaire.
Smart contracts et ad exchanges 2.0
Une autre application de la blockchain est celle des “smart contracts”. Le Nasdaq a annoncé le lancement à la fin de l’année du New York Interactive Advertising Exchange, une plateforme sur laquelle les inventaires pourront être vendus à l’aide de fonctionnalités nativement permises par la blockchain : parmi elles, les smart contracts. Ces derniers facilitent les échanges en automatisant l’exécution des contrats dès que les conditions y figurant sont remplies, et notamment les conditions de prix (une règle simple qui peut être mise en place est de n’exécuter le contrat que si le prix de l’acheteur est égal à celui du vendeur par exemple).
Ensuite, le NYIAX propose la vente d’inventaires premium à un prix plus bas que les ventes en direct, mais plus élevé que sur les ad exchange classiques. Cela évite aux éditeurs premium de « brader » leurs inventaires invendus sur les ad exchange. De même, le NYIAX permet la réduction des frais intermédiaires que les éditeurs rencontrent sur les plateformes RTB (pouvant aller jusqu’à 50% de leurs revenus).
Le NYIAX conduit actuellement un programme pilote avec certains clients avant le lancement officiel.
Enfin, bien que les places de marché privées soient perçues comme une solution à la fraude, il en est différemment dans les faits, des divergences significatives apparaissant dès lors que le deal passe par une SSP ou une DSP(2). En fournissant une source d’informations unique, fiable et vérifiable, la blockchain permet de simplifier grandement l’exécution et la vérification de ces deals privés.
Les limites du blockchain advertising
Bien que le blockchain advertising ait tout de la solution miracle aux maux de la publicité sur internet, il se heurte actuellement (et risque de s’y heurter un moment) au problème de l’adoption. En effet, de manière générale, la blockchain ne fonctionne de manière optimale que si tous les participants à la chaîne sont présents. Au vu du paysage display actuel, particulièrement éclaté, il risque d’y avoir un moment de latence avant qu’annonceurs, éditeurs, DSPs, SSPs et Ad exchanges ne se décident à franchir le pas.
Ensuite, la technologie du blockchain est telle que plus les participants au réseau sont nombreux, plus les transactions peuvent être vérifiées rapidement, et mieux l’ensemble fonctionne. Actuellement, l’affichage d’une impression se fait en quelques millisecondes, alors que la vérification de la transaction peut prendre jusqu’à 15s : cela rend pour l’instant impossible la vérification instantanée de la fraude, mais ne pose aucun problème si l’on s’en sert comme outil de vérification post-campagne.
Conclusion
Bien que la lutte contre la fraude publicitaire soit en train de se concrétiser, certaines « mauvaises habitudes » du paysage digital restent difficiles à changer : on pense notamment au taux d’utilisation des adblockers en hausse constante, témoin d’un véritable ras-le-bol des utilisateurs face aux formats de publicités de plus en plus intrusifs. D’où la création du navigateur Brave – par le fondateur de Mozilla et de JavaScript, entre autres –, basé sur la blockchain, et qui rémunère à la fois directement les éditeurs, mais aussi les utilisateurs qui acceptent de regarder les publicités. L’accueil est pour l’instant mitigé, mais la multiplication d’initiatives similaires porte à croire que le monde de la publicité digitale évolue pour le mieux.
Sources :
(1) http://www.offremedia.com/adloox-estime-la-valeur-mondiale-de-la-fraude-publicitaire-164md-en-2017
(2) « Rocket Fuel and IAS Study Finds Up to 70 Percent of In-Stream Video is Misrepresented In-Banner” – https://videoadnews.com/2017/04/06/rocket-fuel-and-ias-find-that-in-certain-cases-up-to-70-percent-of-in-stream-video-ad-inventory-is-misrepresented-as-in-banner/*