Compte tenu de l’océan de données disponibles pour les marques aujourd’hui, certains annonceurs trouvent parfois rassurant de s’entourer d’une multitude de ces données : graphiques, dashboards, indicateurs, etc. Mais bien souvent, cette profusion de données les empêche de trouver le phare qui guidera leur business vers le succès.
Considérons les deux scénarios suivants :
- Vous présentez à votre chef les performances trimestrielles et votre rapport comprend une centaine de slides. Au fond de vous, vous savez que seulement une fraction de ces informations seront retenus. Que faites-vous ?
- Votre tableau de bord digital comprend 98 métriques selon 12 dimensions et même si votre police en taille 6 fait en sorte que cela rentre sur une seule page, vous savez que ce fonctionnement rend la donnée incompréhensible. Comment avancer ?
Si vous vous êtes déjà retrouvé dans une situation similaire, alors vous avez passé la première étape vers votre ceinture noire de la data analyse, à savoir, réaliser que la donnée ne doit pas être utilisée pour répondre à la peur de ne pas assez l’utiliser.
Dans cet article, nous verrons comment de simples techniques peuvent vous aider à sélectionner stratégiquement les données qui permettront d’apporter le plus de recommandations actionnables pour votre entreprise.
I. Se concentrer sur les KPIs et éliminer les métriques
Il est essentiel de différencier un KPI d’une métrique :
- Métrique : Une métrique est un nombre.
- KPI : Key Performance Indicator (KPI) est une métrique connectée à la réussite de votre activité.
Le temps passé sur une page, le nombre de followers ou le volume de visites sont tous des métriques. Chacune de ces métriques entrent dans la case “intéressantes” mais ne sont pas liées à la “réussite de votre activité”. Il est possible qu’une variation de +/- 25% d’une de ces métriques n’ait aucun impact sur les performances globales de votre entreprise.
Le nombre de transactions, la marge ou encore le revenu sont quant à eux de très bon KPIs. Chaque KPI a une valeur stratégique et permet de répondre à une question précise, par exemple “C’est donc grâce à cela que nous avons fait une très bonne année !”. Il est pratiquement certain qu’une variation de +/- 25% sur un KPI soit d’une importance capitale pour votre entreprise et dans certains cas permette de faire la différence entre des primes de fin d’année ou un plan social.
Quand vous vous retrouvez devant une quantité impressionnante de données, identifiez les métriques qui serviront uniquement aux équipes opérationnelles pour réaliser des micro diagnostiques (de nombreux acteurs du digital fonctionnent déjà avec ces métriques) et intéressez-vous d’abord aux KPIs car ce sont ces indicateurs qui compteront pour votre senior management.
Chaque entreprise devrait avoir à peu près 6 KPIs pour un CEO et 12 pour un CMO. Faites l’exercice pour votre propre entreprise et si vous arrivez à 30 KPIs, c’est qu’il est peut-être temps de revoir cette organisation.
II. Se concentrer sur les KPIs ayant des objectifs préétablis
Objectifs : valeurs numériques préétablies indiquant un succès ou un échec.
En pratique, établir des objectifs est extrêmement compliqué. Il Faut être un expert en prévision, étude de la concurrence, saisonnalité, prendre en compte le planning des investissements et les éventuels changements d’organisation ou évolution du mix média.
C’est pourquoi la plupart des entreprises établissent des objectifs uniquement sur les KPIs qui en valent la peine.
Jetez maintenant un œil à vos propres rapport/tableaux de bord, avez-vous des objectifs pour 32 métriques à travers 12 dimensions ? Comment ces objectifs ont-ils été déterminés ?
Si vous vous trouvez dans cette situation et que vos objectifs sont obtenus via une règle de trois par rapport aux valeurs de l’année dernière, il est possible qu’ils ne prennent pas en compte l’ensemble du tableau et qu’ils ne permettent pas de répondre correctement à la question : mes actions sont-elles un succès ou un échec ? Question que tout CEO se pose.
Dans ce cas, commencez par identifier les KPIs qui nécessitent vraiment votre investissement pour leur déterminer des objectifs basés sur un benchmark approfondi du marché et de la concurrence, de la politique interne de votre entreprise, des projections fines de leur évolutions et un peu de votre bon sens.
III. Se concentrer sur les outliers (valeurs aberrantes)
Vous avez maintenant identifié les 12 KPIs pertinents pour votre activité et, après un gros travail de recherche, vous leur avez attribué des objectifs. La question qui se pose maintenant est : à chaque fois vous que vous allez consulter votre tableau de bord ou vos rapports, comment identifier ce qui a un comportement normal vs ce qui requiert votre attention ?
La réponse : Concentrez-vous uniquement sur les KPIs pour lesquels la performance à déviée de plus de 3 écarts types de la moyenne sur la période d’étude.
Petite parenthèse « statistiques » :
Pour un indicateur suivant approximativement une distribution Normal, environ 68% des valeurs se trouveront à + ou – un écart type de la moyenne, 95% pour deux écarts types et 99,7% vivent entre -3 et +3 écarts types.
Source : Wikipedia
En portant votre attention uniquement sur les performances qui dévient de plus de trois écarts types, vous ignorez l’attendu pour ne regarder que l’inattendu.
Si vos KPIs ont peu de variations, considérez seulement deux écarts types.
L’objectif est vraiment de mettre en avant des comportements anormaux, car si les performances sont dans le domaine de l’attendu, quel est l’intérêt de communiquer à vos supérieurs “les performances sont comme d’habitude” ?
L’identification d’outliers et la compréhension des phénomènes les ayant causés est vraiment la clé pour générer de la valeur avec vos données et arriver à prendre des décisions éclairées.
Il existe différentes approches pour identifier des outliers, une bonne astuce est d’utiliser l’intervalle de confiance pour remarquer d’un coup d’œil si certains éléments nécessitent votre attention ou non.
IV. La contextualisation est la clé
Cette astuce est probablement la plus difficile car elle demande d’être un vrai ninja de la donnée, mais c’est sans doute celle qui aura le plus gros impact sur votre activité.
Aucun CEO ne veut de la donnée. En tant que data scientist, cela me coûte de l’écrire mais c’est pourtant vrai !
Un CEO souhaite seulement être influencé par la donnée et ainsi se concentrer sur la résolution de problème qui feront avancer l’entreprise. Si la résolution de problèmes fait partie de leurs compétences clés, la compréhension de la donnée ne l’est pas. C’est pourquoi la prochaine fois que vous communiquerez des résultats, pensez à ajouter du texte à côté de chaque métrique répondant aux questions suivantes :
WHY ?
Pourquoi cette métrique s’est-elle comportée comme cela ?
Une explication des facteurs ayant causés les fluctuations. La valeur ajoutée des chiffres que vous présenterez se verra décuplée si vous êtes en mesure de les contextualiser. La tâche peut être ardu car les facteurs sont souvent multiples et impliquent une connaissance de toute la chaîne de valeur de la donnée : lancement d’une campagne, changement de format de diffusion, ajout d’un acteur dans le mix média, saisonnalité, tracking, …
WHAT ?
Quelles actions doivent être prises ?
Expliquez en vous appuyant sur les facteurs explicatifs, quels sont les prochaines étapes à réaliser. Le succès de vos recommandations dépendra de votre profonde connaissance du fonctionnement de votre entreprises et de sa stratégie.
En faisant cet exercice vous atteindrez deux objectifs :
D’abord vous mettrez en évidence qu’en ce qui concerne les métriques inutiles, peu importe les réponses aux WHY/WHAT, l’impact sera insignifiant et ces métriques ne seront rapidement plus regardées par votre senior management.
Pour les métriques restantes, il s’agira probablement de vos KPIs, les discussions impliquant leur gestion seront les plus productives pour votre entreprise !
Après quelques mois d’utilisation de ces astuces, vous verrez que la peur de ne pas avoir assez de données aura disparu, que toute la hiérarchie aura une vision claire des performances et que les discussions sur la direction à prendre seront d’une productivité encore jamais vue !